(Entretien avec Marcel Mézy en 2009)
Au volant de son pick-up, Marcel Mézy a le sourire de l'homme heureux de faire partager ses passions. Sur ce Causse du Nord Aveyron, il a promis de nous faire remonter jusqu'à la source de sa découverte, voici 25 ans déjà. Le terrain est hostile mais les pur-sang arabes qu'il élève sur plus de cent hectares donnent vie à ces grands espaces balayés par la pluie dans ces premiers jours de décembre. Les chevaux sont une des passions de cet agriculteur de 70 ans qui aimerait tant leur consacrer plus d'attention.
Mais un autre combat, celui de toute une vie, habite ce pionnier qui n'a qu'une idée en tête : redonner vie aux sols déstabilisés, souvent même pollués par les intrants chimiques afin que les agriculteurs retrouvent leur autonomie mais aussi leur fierté en participant activement, à leur niveau, à la sauvegarde de la planète.
Marcel Mézy aime à répéter ce dicton paysan : «Quand l'humus s'en va, l'homme s'en va». Et c'est en mélangeant les composts de différents végétaux qui produisent rapidement de l'humus que tout a commencé. Sur les pistes en herbe de ses pâtures, l'homme égrène son histoire, véritable conteur qu'on imagine au coin du feu en train de refaire le monde devant un auditoire captivé.
Dans la ferme des parents, ils sont huit frères à naître sur l'exploitation qui s'avère vite trop petite pour nourrir toutes ces bouches. Marcel part sur les routes, vend des boissons pour un grossiste mais aussi des engrais et produits agricoles. Il est alors un des premiers négociants à essayer de commercialiser des produits biologiques dont les résultats en rendement ne sont malheureusement pas suffisants pour fédérer l'adhésion du monde paysan.
Marcel Mézy est un autodidacte et le soir, il se plonge dans des revues scientifiques qui traitent d'agriculture biologique. Dans les années 70, il s'intéresse très vite aux composts, conscient que ces micro-organismes peuvent agir comme un catalyseur de la vie du sol et lui rendre sa capacité naturelle à retenir les éléments fertilisants.
Au début des années 80, un petit coup de pouce du destin va lui faire franchir un palier : «Cela faisait des années que je faisais des composts avec des méthodes différentes, allemandes notamment, et j'avais des résultats qui étaient toujours un peu les mêmes. Un jour de 1982, je n'avais plus de place, j'ai poussé mes tas de compost les uns sur les autres et je me suis rendu compte qu'en mélangeant des plantes originaires des bois ou des prairies par exemple, on arrivait à des résultats complètements différents».
Lorsqu'il effectue ses premières mesures de valeurs sur ces nouveaux composts et les fait analyser, les résultats sont si étonnants qu'il pense à une erreur du laboratoire. Les nouveaux échantillons reviennent, toujours porteurs d'autant d'espoirs. L'heure est maintenant arrivée d'étendre à même les champs ces composts qui jusqu'alors ne servaient qu'à faire fermenter litières et lisiers. Les premiers résultats viennent conforter ce qu'il pense depuis longtemps : la production d'acides humiques dans le sol étant faible, l'agriculteur de Bozouls a maintenant la preuve que l'on peut en produire très rapidement sans apport de fumier. Durant toutes ces années 80, l'entreprise en reste à un stade artisanal mais profite à un nombre grandissant d'agriculteurs aveyronnais. Le regard bleu de Marcel Mézy s'éclaire encore un peu plus lorsqu'il évoque cette période faite d'amitié et de solidarité : « Mon souci premier était que les agriculteurs qui travaillent avec nous y trouvent leur compte. Ils ont vite vu qu'ils ne perdaient pas en rendement, que leurs bêtes étaient moins malades et surtout que leurs terres gagnaient en fertilité ».
Le bouche à oreille fonctionne à merveille et la découverte de Marcel Mézy a vite fait de franchir les montagnes d'Aubrac et le plateau du Lévezou. En Bretagne, dans le Limousin, au Pays Basque, des agriculteurs se lancent dans l'aventure, beaucoup allant jusqu'à abandonner complètement tout engrais chimique. Les réunions d'information se multiplient alors que parallèlement, certaines instances agricoles et de gros consortiums de l'industrie chimique mènent une campagne de désinformation pour dénigrer cet empêcheur de tourner en rond.
La naissance de la Sobac en 1992 ne fait qu'accentuer les choses mais Marcel Mézy n'est pas homme à courber l'échine. «Les agriculteurs qui sont de l'aventure avec nous sont nos meilleurs ambassadeurs». Ce que certains aimeraient faire passer pour de «la poudre de perlimpinpin», en a sauvé plus d'un et dans les moments difficiles, ils répondront toujours présents quand il s'agira de témoigner. À la Sobac on aime à répéter : «Nous avons aidé plus d'un agriculteur à retrouver leur fierté paysanne, à communiquer leur passion à leurs enfants». Des chercheurs de l'Inra, des professeurs émérites de l'Institut National agronomique apportent peu à peu leur soutien scientifique au paysan-chercheur aveyronnais qui, avec ses associés, se retrouve maintenant à la tête d'une entreprise de plus de soixante personnes.
Comme ces plantes qui s'enracinent plus profondément et solidement dans le sol du Causse grâce à ses découvertes, les idées de Marcel Mézy sont en train de bousculer le monde formaté de l'agriculture. Plus rien désormais ne sera comme avant.
Assis sur un muret en pierres sèches, le regard perdu vers l'horizon tourmenté de la campagne aveyronnaise, Marcel Mézy sait qu'avec ceux qui l'entourent depuis le début de l'aventure, l'histoire est en marche de façon inéluctable : «Les mentalités évoluent, le Grenelle de l'Environnement fait réfléchir. Les gens se précipitent au cinéma pour voir des documentaires qui traitent de ces problèmes. Le scandale des pesticides, c'est pire que l'amiante. Les gens commencent à le savoir mais ça va être terrible».
Au détour d'un chemin, sur un des trois sites qui abritent des composts en cours d'humification ou au milieu des genévriers, Marcel Mézy, un sourire malicieux au coin des lèvres, nous donne quelques clés pour mieux comprendre sa démarche mais le secret de la composition de ses produits restera bien gardé.
Les années passent, les projets se bousculent. La nuit tombe sur le Causse. Marcel Mézy, l'idéaliste, évoque avec pudeur un dernier rêve : «J'aimerais tellement qu'un jour ce produit puisse être distribué gratuitement dans les pays du Tiers-Monde. La faim dans le monde n'est pas une fatalité».
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